Notre voyage de 2024
Cette année, nous avons pris la décision exceptionnelle de nous rendre en Éthiopie à une période inhabituelle, conscients de la situation financière critique que traverse l’orphelinat en raison de l’inflation galopante. Le voyage a été dense. Nous avons aussi accompagné la visite de deux représentants d’une ONG française.
Durant cette semaine, nous avons consacré beaucoup de temps à rechercher des partenaires financiers en Éthiopie. Nous avons sollicité une ONG locale concernée par nos activités, ainsi qu’une importante ONG française. Malheureusement, ces démarches se sont révélées infructueuses dans les deux cas. Trouver des financeurs est une préoccupation permanente. Nos besoins ne cessent de croitre malgré la diminution régulière du nombre de jeunes au centre.

Certains jeunes se sont accaparés des zones du jardin et cultivent des oignons pour en vendre les graines.
La situation financière se complique encore davantage avec l’augmentation de l’âge de nos bénéficiaires. Cela entraîne une hausse des dépenses liées à leur éducation et à leur entretien. De plus, l’inflation devrait atteindre environ 28 % en 2024. Tous les éthiopiens en souffrent, et nos jeunes, en instance de quitter le centre, sont particulièrement concernés par cette augmentation permanente du coût de la vie. Le contexte budgétaire est compliqué : un euro vaut 62 birrs. L’inflation est galopante car certaines régions ne produisent plus de denrées de première nécessité par manque d’accès aux engrais et les productions au nord du pays ne peuvent être transportées en territoire Oromo.
Leur moral est au plus bas : ils sont inquiets et stressés à l’idée de partir sans savoir s’ils pourront gérer seuls leur situation. Cette appréhension les pousse à retarder leur départ, ce qui alourdit encore nos charges. Certains cherchent à retrouver leur famille biologique ou ce qu’il en reste. Nous les encourageons évidemment dans cette démarche. Dans certains cas, ils peuvent visiter leur famille retrouvée pendant les vacances scolaires. Cette famille qui les a abandonnés par le passé sera peut-être pour eux un refuge dans l’avenir.
Nous accueillons en ce moment 169 jeunes (106 garçons et 63 filles) dont 46 sont séropositifs au HIV (22 garçons et 24 filles). 59 d’entre eux sont logés dans l’orphelinat les autres sont en familles d’accueil, en résidences universitaires ou en maisons louées expressément pour les jeunes séropositifs. Tous sont scolarisés dans des écoles du gouvernement ou des écoles privées. Les enfants handicapés sont également scolarisés dans des écoles spécialisées.
Les écoles sont choisies en fonction de leur proximité du centre pour des raisons de coût de transport. Un problème subsiste : de nombreuses universités au nord du pays sont encore fermées par mesure de sécurité. De ce fait, nous sommes obligés d’inscrire certains de nos jeunes dans des écoles privées en lieu et place de ces universités mises en sommeil. Cela nous coûte cher et l’enseignement y est de moindre qualité. Les écoles privées sont un business très lucratif et certaines délivrent un piètre enseignement. En conséquence, il arrive que l’état intervienne pour durcir les critères d’obtention des diplômes. Ce sont alors souvent des écueils supplémentaires pour les jeunes au niveau scolaire moyen qui n’ont pu accéder à l’université d’Etat gratuite. L’Etat a aussi décidé un droit d’inscription de 500 birrs par enfant dans toutes les écoles primaires.
10 jeunes ont terminé leur scolarité en septembre (pharmacie, management d’hôtel business, management, comptabilité, soins infirmiers, tourisme…), ils sont désormais à la recherche d’un emploi. Parallèlement, depuis janvier 2024, 16 jeunes ont quitté la structure. Ce résultat est positif et nous encourage à continuer.

Boire le café avec les jeunes et les employés pour prendre la température
et désamorcer les tensions entre eux ou du moins les comprendre.
Notre principale difficulté concerne le départ des jeunes qui n’ont pas réussi leurs études et qui tardent à partir par manque de confiance et de courage parfois. Les mois passent et outre le fait qu’ils nous coûtent cher, ils perdent chaque jour un peu plus de chances de rebondir. Nous sommes un peu à la limite de ce que nous pouvons faire pour eux. Il va falloir être plus contraignant ce qui est particulièrement difficile à décider quand on connait ce qui les attend passés nos murs …
Nous avons clarifié notre position auprès du Directeur, du staff et des jeunes susceptibles de quitter la structure…L’objectif de notre réunion était d’informer sur notre réalité matérielle et financière et de faire comprendre à certains jeunes que leur départ est impératif.
Les dépenses les plus lourdes concernent principalement la nourriture, le transport scolaire et les soins particuliers pour les 46 jeunes séropositifs.

Un moment de détente et d’échange avec les filles toujours plus loquaces que les garçons.
Pour illustrer ces coûts additionnels, cinq jeunes, que nous avons rencontrés lors de notre séjour, nécessitent des soins dentaires importants. En l’absence de sécurité sociale en Éthiopie, c’est l’orphelinat qui doit assumer ces frais. Nous nous retrouvons dans un dilemme constant, entre le besoin de répondre aux nécessités de base des enfants et l’obligation de trouver des fonds supplémentaires.
Nous avons aussi eu un entretien avec Ato Menelik le directeur financier de Mekdim (Mekdim Ethiopia National association). Pour rappel Mekdim intervient au sein de l’orphelinat depuis plus d’un an afin d’accompagner les jeunes porteurs du VIH. Nous avons insisté pour avoir l’évaluation du projet au plus vite afin déclencher le paiement des soldes d’aides obtenues en France.
Nous avons demandé si tous les jeunes sont actuellement rattachés médicalement à leur organisme, ce n’est pas encore le cas pour tous mais Mekdim est prêt à les accueillir afin de leur assurer une aide médicale. Il faut qu’ils en fassent la demande.
Nous avons expliqué nos difficultés au Directeur de Mekdim qui a dit souhaiter nous aider. Ils n’ont pas de projet sur la ville de Burayu pour l’instant.
Ils vont continuer au-delà du projet actuel à suivre nos jeunes et à intervenir à Burayu. Tous s’entendent sur le fait que les jeunes prennent maintenant correctement leurs médicaments, ils considèrent ce projet comme le leur maintenant.
Concernant le jardin, une grande partie du jardin est cultivée par un salarié de l’orphelinat et une partie plus petite par trois jeunes qui font des semences d’ail ! (Samuel , Yohannes et Abera).

Dans une chambre de filles un stand de chargement des téléphones portables protégés dans des chaussures
Présentation de quelques jeunes :
Mesfin Meleke (18 ans)
Il est élève en grade 11 à l’école secondaire Asko, avec des résultats moyens. Il suit une physiothérapie trois fois par semaine pour un problème de dos et logiquement il devait revoir le chirurgien cette année. Mesfin est discipliné, sociable, et persévérant. Il participe activement aux activités du centre et s’intéresse à la sculpture. Il souhaite devenir traducteur dans le domaine du tourisme.


Surafel Wondimu (21 ans)
Il est étudiant en deuxième année de collège en Tourisme et Guide à la Lion Ethiopia Shool. Il suit également un cours d’entrepreneuriat. Surafel interagit peu avec les autres enfants de l’orphelinat. Ses notes sont satisfaisantes. Ses aspirations professionnelles ont évolué vers le tourisme, bien qu’il rêve encore de devenir pilote ou conducteur automobile. Il suit un traitement pour des soins dentaires et dermatologiques.
Roza Dawit
Elle est élève en grade 11 à l’école secondaire Medhanealem. Elle a redoublé sa classe l’année précédente à cause de problèmes de santé et de résultats scolaires faibles. Elle suit un traitement antirétroviral depuis plusieurs années. Roza est respectueuse et amicale, elle préfère passer plus de temps avec ses camarades d’école qu’avec les autres enfants de l’orphelinat. Elle change fréquemment d’ambition professionnelle oscillant entre médecin, entrepreneuse et designer. Elle bénéficie d’un soutien supplémentaire (logement, repas, soins infirmiers) en raison de sa santé fragile.

Yekeba Anley (18 ans)
Elle est élève en grade 11 à l’école secondaire Asko (30ème sur 75 élèves, c’est un résultat moyen). Sa matière préférée est l’économie. Elle est en très bonne santé.
Yekaba est réservée et respectueuse envers ses camarades. Elle préfère passer du temps seule à écouter de la musique ou regarder des films tout en travaillant sur des projets créatifs comme le tricot ou la conception vestimentaire pendant ses vacances. Elle voudrait devenir manager.
Ruhama Sentayehu (19 ans)
Elle est élève en grade 11 à l’école secondaire Asko, avec une préférence pour les mathématiques. Elle est en très bonne santé.
Ruhama vit dans une famille d’accueil. Elle est sociable et partage souvent ses projets avec ses amies proches comme Mekdes. Elle aspire à devenir manager dans le secteur hôtelier. Elle n’hésite pas à donner son avis lorsqu’une activité est envisagée dans le centre.

